13 mai 2024

Mémoire présenté au MCCQ le 17 avril 2024

 

 

 

Mémoire présenté au Ministre de la Culture et des Communications 
Monsieur Mathieu Lacombe
Le 17 avril 2024

 

 

 

  1. État d’urgence
  2. Conséquence : démantèlement d’une culture en plein essor
  3. Rattraper le retard, empêcher le recul
  4. Prévoir pour l’avenir

 

 

Depuis la présentation du budget en mars dernier, nous avons appris que les fonds alloués à notre mission seraient augmentés de 4,8 millions de dollars pour la prochaine année, soit celle des demandes quadriennales. Cette annonce suscite une vive inquiétude parmi nos organismes, car cette augmentation ne représente qu’une hausse de 5,5% depuis le dernier cycle de financement quadriennal, alors que l’inflation sur la même période s’élève à 21% et que le salaire minimum a augmenté de 40%. Ces fonds étaient déjà insuffisants en 2017-2018, et cette situation risque de s’aggraver avec l’inflation prévue au cours des quatre prochaines années.

 

 

1.  La situation : un état d’urgence

 

En plus de ce financement anémique, de multiples facteurs aggravants forment la tempête parfaite qui menace l’intégrité de notre écosystème :

 

a) Retour de pandémie

 

Depuis la fin de la pandémie, même si nos salles attirent un nombre important de spectateurs, nous constatons une chute drastique des abonnements, ce qui engendre des coûts considérables pour des campagnes publicitaires visant à vendre des billets individuels, sans compter la précarité d’un manque de prévisibilité des revenus autonomes.

 

b) Pénurie de main d’œuvre, conditions de travail

 

La pénurie de main-d’œuvre et la hausse importante du salaire minimum affectent nos échelles salariales au-delà de l’inflation.

 

c) L’Inflation

 

L’inflation nous affecte doublement: d’une part en augmentant nos coûts et en réduisant la capacité du public à se procurer des billets de spectacles, réduisant notre capacité à augmenter nos revenus autonomes.

 

d) coûts des lieux

 

En outre, l’augmentation exponentielle des coûts liés aux infrastructures et aux matériaux, financés à même nos subventions artistiques, aggrave notre situation financière.

 

 

2. Les conséquences : le démantèlement d’une culture en plein essor

 

a) Conséquences concrètes

 

Devant l’incapacité de réduire les coûts fixes, seuls les frais variables pourront être réduits. Or ces frais sont notre mission première: nos spectacles. Concrètement, cela représente moins d’artistes embauchés, de plus petites distributions, des œuvres de moins grandes envergures, moins événementielles et moins de productions. En plus de générer moins d’emplois et de fragiliser l’écosystème artistique, ces choix viennent compromettre l’ensemble de nos revenus autonomes, puisque cela affectera notre capacité d’attraction auprès du public, des commanditaires et des philanthropes. Les conséquences de cette spirale seront visibles dès l’an prochain.

 

Avec le gel des subventions aux projets depuis sept ans, et sans perspective d’augmentation pour les quatre prochaines années, soit un total de onze ans, certaines compagnies de théâtre ou artistes prévus dans nos programmations risquent de ne pas obtenir le financement nécessaire pour se produire, ce qui pourrait entraîner l’annulation de certains spectacles. Ce sont les structures qui, dans beaucoup de théâtres diffuseurs-producteurs, produisent la moitié de ce qui est diffusé dans nos salles. Le gel de leur moyen est aussi dramatique sur nos programmations que le gel de nos moyens en tant qu’institutions.

 

b) L’écosystème

 

Notre infrastructure culturelle s’est érigée au fil de plusieurs décennies, la création d’un écosystème, la consolidation professionnelle, les investissements dans les infrastructures, la création d’organisations et d’associations, ainsi que le développement continu ont permis d’établir solidement le Québec comme un acteur majeur dans les arts vivants et autres domaines culturels, jouissant d’une renommée internationale. Cependant, malgré cette reconnaissance, notre tissu culturel demeure fragile. Les contraintes budgétaires actuelles menacent de démanteler cet écosystème que nous avons mis tant d’années à construire, ce qui pourrait entraîner la fermeture de lieux culturels, compromettre la pérennité de nombreuses productions artistiques et surtout, l’accès à la culture pour les citoyen.nes québécois.es. Chaque partie prenante du milieu est interreliée, en fragiliser une affecte l’ensemble du secteur par ricochet.

 

c) Le rayonnement local et international

 

L’identité québécoise tire une partie de sa fierté et de sa richesse de son rayonnement culturel. Tout cela sera compromis si nous ne disposons plus des ressources nécessaires pour réaliser nos ambitions. Couper dans la culture, c’est amoindrir directement l’expression et donc la vitalité de l’identité québécoise.

 

 

3. Les pistes d’action : Rattraper le retard, empêcher le recul

 

a) L’importance d’augmenter le soutien à la mission dès maintenant

 

Selon les sommes allouées récemment, 453 organismes culturels soutenus à la mission se partageront 4,8 millions en 2024-2025. Ces organismes sont (par définition même) pourtant le cœur battant de la culture au Québec et de sa création et diffusion dans toutes ses régions.

 

Pour maintenir nos opérations, sans même voir à l’amélioration souhaitable des conditions des artistes, un montant supplémentaire de 20 millions est nécessaire pour l’année à venir.

 

b) Consolidation budgétaire et indexation

 

Il est nécessaire de consolider le budget du CALQ pour répondre efficacement aux besoins des arts et des lettres, en lui accordant ainsi la possibilité de répartir ses enveloppes de financement de manière flexible sur une période de quatre ans. Cette souplesse dans l’allocation des fonds serait également très bénéfique pour les organismes œuvrant à la mission qui pourraient parer aux années plus difficiles, tel que ce fut le cas pendant la pandémie. D’autre part, l’indexation annuelle des budgets est essentielle pour assurer une stabilité et une prévisibilité financière tant pour le CALQ que pour les organismes qu’il soutient.

 

4. La suite : Prévoir pour l’avenir

 

a) Capacité de prévoir et pérenniser

 

Une indexation et consolidation des budgets du CALQ est un premier pas vers plus de prévisibilité. Nous apprenons que la mesure de billetterie, qui nous permettait de compenser les pertes et qui devait être maintenue jusqu’en 2025 disparaîtra en juin 2024. Cette mesure était incluse dans les budgets de plusieurs de nos théâtres pour l’année prochaine. Cela illustre bien l’importance de la prévisibilité pour pouvoir planifier nos saisons à venir et prendre des décisions éclairées qui n’aggravent pas davantage nos déficits.

 

b) TAI comme allié du MCC

 

Nous souhaitons collaborer étroitement avec le MCC pour réfléchir ensemble à des solutions viables pour le gouvernement, pour le Conseil des arts et des lettres du Québec, et pour nos organisations.